Ben a 31 ans. Passionné de jeux vidéo, il fait profiter de ses connaissances aux magasins spécialisés et à la communauté de gamers de l’île Maurice. Incursion dans le monde d’un expert en jeux vidéo, ou expert vidéoludique.
Ben, tu es au service des magasins, des gamers et de l’Institut Français de Maurice (IFM) en tant qu’expert en jeux vidéo. Quelle est ta mission ?
Au sens large, ma mission consiste à promouvoir le jeu vidéo comme étant un produit de divertissement au sein d’une industrie en constante évolution, mais aussi comme étant un art.
Cela prend différentes formes. Pour l’IFM, j’aide à la sélection des jeux qui pourraient avoir un intérêt culturel, artistique ou ludique. Je présente des titres alternatifs à un public qui peut ainsi élargir ses connaissances. Il existe plusieurs gammes de jeux vidéo, et tous ne sont pas forcément faciles d’accès ou intuitifs.
C’est grâce à mes connaissances et à mon expérience sur des milliers de titres, ainsi que mon expertise sur les tendances du marché en termes de matériel et de jeux, que je peux aider les commerces, leur clientèle et les particuliers.
Comment as-tu acquis cette expertise ?
Le jeu vidéo est avant tout pour moi une passion, pas seulement le jeu en soi, mais tout ce qui le compose : graphisme, musique, mise en scène, promotion, message dégagé par celui-ci. Il y a de nombreux éléments et autant de niveaux d’appréciation. Ce n’est que l’expérience qui peut te permettre d’acquérir cette expertise. L’expérience des salles d’arcade, des cybercafés, des jeux en solo ou en multijoueur, des différents supports (console, PC, mobile, etc.), et des divers genres de jeux.
Dans tous les cas, il faut être curieux et touche-à-tout, apprendre d’autrui et isoler son égo, investir de son temps mais aussi de sa poche ! Il faut s’intéresser à l’histoire, le pourquoi et le comment, les différents acteurs de l’industrie du jeu vidéo (producteurs, développeurs, éditeurs, etc.). Il faut aussi constamment suivre l’actualité du gaming.
Ton activité d’expert en jeux vidéo est un extra, en ceci que tu exerces à plein temps en tant que consultant en informatique et webmaster. Est-il tout de même possible d’envisager une carrière à plein temps en tant qu’expert vidéoludique ?
Ceci serait un idéal et j’en réalise déjà les grandes lignes. Toutefois cet idéal ne se produit pas forcément ici : les consultants en jeux vidéo exercent surtout dans des environnements tels que les maisons d’édition, la presse ou encore chez les testeurs. Ce sont des choses qui éclosent à Maurice, mais encore trop timidement pour qu’on en parle concrètement.
Qu’est-ce qui t’a poussé à t’orienter dans ce domaine ?
La passion, certes, mais ainsi l’encouragement de certains commerçants dans le domaine. Par ailleurs, j’ai toujours voulu partager ma passion, mais aussi élargir le point de vue des autres, les aider à découvrir et se forger une propre opinion de l’univers du jeu vidéo. Il y a un certain ras-le-bol à voir des gens, joueurs ou non, coincés dans des préjugés, de voir des jeunes se cantonner à jouer à un seul jeu. Voilà comment j’ai atteint le stade où j’en suis aujourd’hui.
L’univers du jeu vidéo fait des accros à tous les âges. A quand remonte ta première interaction avec une console ?
Cela remonte à l’enfance pour les premiers Game and Watch, vite remplacés par la Game Boy, les premiers jeux PC cultes tels Wolfenstein 3D et Prince of Persia sur de vieux ordis chez des proches, ainsi qu’une Atari comme première console de salon.
En tant qu’expert vidéoludique, quels sont les aspects que tu prends en considération lorsque tu évalues un jeu ?
Je juge avant tout un jeu pour ce qu’il apporte à son genre. Je l’évalue face aux précédents jeux du développeur ainsi qu’à sa compétition ou ses sources d’inspiration. Je l’évalue sur sa direction artistique, sa musique, son scénario, son message ou ses propos. Beaucoup de gens arrêtent leur jugement au graphisme, alors que celui-ci n’est qu’un bonus.
A quel type de public as-tu affaire dans le cadre de cette activité ?
Pour ce qui est de l’IFM, je m’adresse surtout à des enfants pour l’instant et nous prévoyons des sessions pour un public plus mûr. Je suis agréablement surpris de voir des enfants chercher un titre dont ils ont vu la pub, un jeu auquel ils n’ont jamais joué, et s’adapter très vite, plus vite que bien d’autres joueurs parfois plus vieux ! Sinon, dans les magasins où j’ai été sollicité, j’ai rencontré plusieurs générations de joueurs et j’ai pu constater une certaine démocratisation au niveau du jeu vidéo.
Parle-nous des différents types de jeux disponibles sur le marché ou en incubation.
Les jeux vidéo sont disponibles sur ordinateur, sur mobile ou sur console portable ou de salon. Pour ce qui est des genres il y en a pour tous les goûts, quasiment de tout, du jeu de course à la simulation du film d’horreur interactif, en passant par le jeu de réflexion en solo où tu alignes les couleurs ou encore le jeu ultra compétitif en multijoueur et en arène. Nous verrons bientôt l’émergence de jeux plus axés sur la réalité virtuelle et les casques associés, tel le HTC Vive.
As-tu une préférence, ou es-tu spécialisé dans un type de jeu en particulier ?
Je suis un touche-à-tout mais j’ai des préférences, comme par exemple :
- les jeux de combat 2D type Street Fighter, King of Fighters ou encore Blazblue
- les jeux de tirs à la troisième personne type Gears of War
- les jeux de tirs à la première personne comme Quake 3, Unreal Tournament (UT), et Bioshock Infinite
- les jeux de stratégie à l’instar de Starcraft
- les jeux de rôles comme la série Persona
- les visual novel games du genre Ace Attorney, Danganronpa et Zero Escape.
Comment es-tu parvenu à te hisser parmi les références en matière de jeu vidéo à l’île Maurice ?
Je me suis fait connaître via certaines compétitions ainsi qu’en aidant divers commerçants, au début comme client, ensuite comme régulier et finalement en tant qu’ami. Ceci m’a permis de tisser des liens forts dans les différentes communautés.
Y a-t-il d’autres personnes qui partagent ta passion, voire ton activité, dans le pays ?
Il y a effectivement beaucoup de passionnés à l’île Maurice. Toutefois, ils sont peu nombreux à pouvoir aller au-delà de leur zone de confort : celle-ci peut être un genre ou une console en particulier. D’autres en font leur business : ils importent et vendent des jeux.
Le titre d’expert vidéoludique ne peut pas non plus être adopté par le premier gamer venu. Quels sont les critères à remplir pour être reconnu dans la sphère des jeux vidéo en tant qu’expert ?
Il faut la connaissance, plus qu’autre chose. On peut vous respecter si vous êtes bon à un jeu ou deux mais c’est la vraie connaissance en plus de l’expérience dans le domaine qui vous distingue des profils plus ou moins ordinaires.
Le mot de la fin ?
Je pense que comme pour les livres ou les films, il y a un jeu quelque part qui vous parlera plus qu’un autre. Mon rêve est d’aider les gens à le trouver car le lecteur vit plusieurs vies à travers un livre, mais le joueur, lui, en vit des milliers.