Même s’il y a un intérêt grandissant à l’île Maurice pour le sport électronique, ou eSport, c’est un domaine qui ne reçoit toujours pas suffisamment de visibilité. Pourtant, League of Legends (LoL), Defense of the Ancient 2 (DotA 2), OverWatch (OW), Starcraft II (SC2), FIFA ou encore Counter-Strike Global Offensive (CSGO) sont loin d’être des termes inconnus pour les Mauriciens. Nous sommes donc allés (virtuellement) à la rencontre de Symbiosis Gaming, grand gagnant du MSI CSGO Mauritius Tournament 2018 par Elytis, pour nous en dire plus sur l’eSport à Maurice.
Tout d’abord, parlez-nous de Symbiosis Gaming ? Qui sont les membres qui se cachent derrière ce logo ?
Fondé par Darren Motay et Mathieu Lacaze, à l’origine Symbiosis Gaming était juste un groupe d’amis qui jouaient à Counter-Strike depuis 5-7 il y a des années. Nous avons prospéré en jouant contre les meilleures équipes de la région africaine. Puis, en 2018 nous nous sommes inscrits dans une ligue en ligne organisée par Telkom VS Gaming (le leader des jeux en ligne en Afrique du Sud).
À la fin de l’année, à notre grande surprise, nous nous sommes qualifiés pour participer à leur plus grand tournoi LAN à Comic Con Africa avec un prix cash de 1 million de Rands (environ Rs 2 295 000) à la clé.
Racontez-nous votre aventure autour de ce tournoi
Pour être honnêtes, nous n’avions pas le niveau pour gagner le tournoi, mais le fait d’être parmi les 16 meilleures équipes d’Afrique parmi plus de 200 participants était un accomplissement en soi. Nous avons eu environ deux semaines pour trouver un sponsor afin de pouvoir nous rendre en Afrique du Sud, mais en raison du manque de temps, d’argent et d’organisation, nous n’avons pas pu le faire. Nous en avons toutefois tiré des leçons et nous avons créé l’organisation Symbiosis Gaming pour promouvoir notre passion parmi la communauté mauricienne comme l’eSport est encore inconnu ici malheureusement.
Symbiosis Gaming est sorti vainqueur du tournoi eSport MSI Gaming 2018
En 2018, nous avons effectivement remporté un prix de Rs 50, 000 lors d’un tournoi parrainé par Elytis MSI. Le line-up était constitué de LycozA (Darren Motay) | Warzus (Wayan Sunnasy) | GamatMaker (Damien Henry) | Laggerino (Chris Haw) | rookii (Shakti Candassamy) | zNasion (Mathieu Lacaze). Les gens à Maurice ne prennent pas l’eSport au sérieux en ce moment. Le principal problème est que la plupart des cybercafés ont fermé en 2015 et cela a tué la communauté des joueurs dans son ensemble, car il n’y avait pas de compétitions et de lieu pour rencontrer nos collègues joueurs. Les chiffres parlent d’eux-mêmes :
2010-2015 = 5 événements au moins par an
2015-2020 = 2 événements
Aujourd’hui, notre objectif principal est de propulser Maurice sur la carte de l’eSport en Afrique au moins.
À La Réunion, Orange Réunion organise des compétitions comme le RUN eSport. Avez-vous déjà essayé d’obtenir des sponsors d’entités similaires à Maurice pour organiser des tournois ?
Nous prévoyons de le faire. Dans le passé, certaines organisations telles que Mauritius Telecom, MSI, Lucozade, etc. ont d’ailleurs parrainé des événements. Nous n’avons pas encore entamé de démarches, car notre objectif principal est de bâtir d’abord la meilleure équipe possible à envoyer en compétition.
Imaginez-vous une possibilité de faire carrière dans l’eSport à l’île Maurice, et que manque-t-il encore pour rendre cela possible ?
En fait, c’est assez difficile. Même si vous avez les compétences pour être un joueur professionnel, vous aurez besoin du soutien des sponsors et organisations, et vous devrez vous y consacrer entièrement. De notre côté nous sommes des joueurs qui font de leur mieux pour devenir meilleurs et pouvoir affronter à l’avenir les meilleures équipes d’Afrique du Sud en ce qui concerne CS:GO. Il y a plusieurs méthodes pour s’améliorer, mais cela demande beaucoup de temps. La plupart de nos joueurs ont déjà un travail, mais aiment vraiment jouer. Mais à cause du manque de vision pour l’eSport à Maurice, aujourd’hui c’est assez difficile d’être un joueur professionnel.
Toutefois, si nous sommes reconnus par le gouvernement, ça pourrait être possible. L’île Maurice relie la région sud-asiatique et sud-africaine, où les gouvernements locaux de la Malaisie et de l’Afrique du Sud investissent dans l’eSport.
Est-ce un grand pas pour passer du statut de joueur occasionnel à celui de joueur professionnel ?
Entre un casual gamer et un joueur pro, il y a un très grand pas ! Tout comme un joueur de football du dimanche comparé à Ronaldo. Le talent ne suffit pas, car il y a tellement de choses que vous devez apprendre et pratiquer dans le jeu dans son ensemble…un joueur occasionnel jouerait environ 7 heures par semaine, mais un pro doit jouer plus de 30 heures par semaine.
Que conseilleriez-vous à ceux/celles qui veulent devenir pros à Maurice ? À quoi faut-il s’attendre, de quoi a-t-on besoin ?
Je lui conseillerais d’avoir un plan B, car une carrière de joueur eSport c’est entre 16 ans et 30 ans et seul un petit pourcentage de personnes peuvent réellement passer pro. Bien manger et un entraînement quotidien c’est un must pour garder une bonne continuité dans le jeu. La consistance c’est la clé.
Le mot de la fin ?
Nous ne sommes peut-être pas la génération qui bénéficiera de tous les efforts que nous déployons pour faire reconnaître l’eSport à Maurice, mais nous espérons que les générations futures seront en mesure de réussir !