Le marketing est un principe consistant à attirer une clientèle susceptible de répondre favorablement à une offre. La Redac d’Ict.io s’est intéressée à un autre genre de marketing, différent de celui pratiqué traditionnellement, le Neuromarketing. Rencontre avec Aaditya Ruggoo qui nous livre les secrets de sa start-up Instinct Mind conçue autour du neuromarketing…
Pour faire prospérer les affaires, peu importe le champ d’activité, il y a toujours une dose de marketing, de publicité. En coulisse, la stratégie consiste à éveiller la curiosité du consommateur pour en savoir davantage sur ses habitudes et à le pousser à l’action c’est-à-dire l’achat du produit. Combien de fois, les femmes ont-elles été tentées d’acheter la belle robe ou la paire de chaussures mise en avant dans un magazine ? Les hommes ne sont pas en reste, nombre d’entre eux ayant craqué pour la belle voiture de sport, même hors de prix. Le fait est que nous succombons tous à la vue de belles choses.
Toutefois, nous sommes nous déjà posé la question : qu’est-ce qui motive notre envie d’acheter ? Pourquoi choisit-on un produit plutôt qu’un autre ? Comment une publicité peut-elle éveiller notre désir ? Il y a dans l’acte d’achat une part de mystère que les marques cherchent à percer. Et pour ce faire, elles misent sur la recherche scientifique sur le cerveau. C’est là que le neuromarketing, une stratégie en plein développement, rentre en jeu. Comment cela fonctionne-t-il ? Pour mieux comprendre, nous sommes allées à la rencontre d’Instint Mind, startup mauricienne spécialisée dans le neuromarketing. Aaditya Ruggoo, le fondateur, livre les secrets entourant ce type de marketing à la Redac d’Ict.io…
Tu as créé Instinct Mind. Peux-tu nous en dire davantage sur cette startup ?
« Je suis Aaditya Ruggoo, fondateur de la startup Instinct Mind, créée en 2017. J’ai une formation de base dans le domaine marketing, obtenue à l’université de technologie de Maurice. J’ai ensuite fréquenté la Copenhague Business School, où j’ai reçu une formation en neuroscience et en neuromarketing appliqué.
Fusionnant les deux formations, j’ai fondé ma startup Instinct Mind, spécialisée dans deux services : le premier est le neuromarketing et le deuxième est ce qu’on appelle le marketing sensoriel. Le concept du neuromarketing peut sembler nouveau, mais sa création date d’il y a dix ans, à l’issu d’un « blind test » effectué par les scientifiques et portant sur deux marques de boissons, Coca-Cola et Pepsi. Le but était de rechercher l’effet provoqué au niveau cérébral par ces deux boissons sur les participants. »
Peux-tu nous expliquer en quoi consiste le neuromarketing ?
« Le neuromarketing est l’application des neurosciences cognitives au marketing et à la communication. Le but de cette discipline émergente est de mieux comprendre les comportements des consommateurs grâce à l’identification des mécanismes cérébraux qui interviennent lors d’un achat ou en face d’une publicité.
En d’autres mots, le but du neuromarketing est de comprendre, par l’observation de l’activité cérébrale, les émotions des consommateurs et leurs implications sur le comportement d’achat ou à la vue d’une publicité. L’utilisation des techniques de neuroscience est un complément des techniques classiques de marketing et viennent combler les failles de ces dernières dans l’analyse des désirs des consommateurs.»
Comment savoir ce qu’un consommateur préfère ?
« Sans rentrer dans des détails trop pointus, connaître la réaction d’un consommateur est « simple » à travers le neuromarketing. Cette technique s’appuie, en effet, sur des examens d’IRMF (NDLR Images à résonance magnétique fonctionnelle), des électroencéphalogrammes, des tests oculométriques entre autres. Ce qui veut dire que des techniques scientifiques sont utilisées pour comprendre la réaction des consommateurs vis-à-vis de certains produits ou publicités, » nous explique Aaditya.
Faisant quelques recherches, nous apprenons, qu’effectivement, ces techniques scientifiques utilisées s’avèrent plus efficaces que les questionnaires écrits ou les discussions de groupe pour analyser la réalité du fonctionnement du cerveau humain en termes de marketing. Il faut dire qu’une question posée lors des enquêtes de comportement n’est pas toujours fiable et implique forcément un biais conscient ou inconscient dans la réponse de la personne interrogée. Toutefois, les études de neuromarketing sont complexes à initier, aussi bien au niveau du choix des sujets que des procédures légales et réglementaires, coûtent cher, et les résultats sont lents à émerger. Cet aspect n’a en aucun cas rebuté Aaditya, qui s’est lancé dans cette aventure entrepreneuriale.
Pourquoi avoir ouvert une entreprise basée sur ce type d’activité à Maurice ?
« J’ai créé Instinct Mind avant tout sur une base de mission humaine. Je m’explique ! Je suis une personne qui croit beaucoup en l’avancement de son pays et j’aime partager avec les autres. Donc le but de ma startup est vraiment basé sur l’humain. Par exemple, si on prend les campagnes sur la sécurité routière du gouvernement et que nous analysons les statistiques, je ne vois aucun impact sur les automobilistes. Et c’est là que je veux apporter de la valeur ajoutée, c’est-à-dire faire une campagne de communication dans laquelle j’ajoute les connaissances de la neuroscience, de voir ainsi ce qui est vraiment susceptible d’interpeller les gens, rendant la campagne plus « humaine ».
En d’autres mots, on ne reste pas sur les acquis qui se basent plus sur la logique de « quand on boit, on ne doit pas conduire », mais on rajoute notre formule, celle des neurosciences. À travers cela, nous travaillons avec les publicitaires, en faisant des études primaires sur les consommateurs. Nous collectons des données à travers les techniques de neurosciences que nous utilisons pour savoir ce qui interpelle l’homme. Nous essayons vraiment de toucher cette zone émotionnelle de l’homme où nous savons que le message, voire la campagne, aura un véritable un impact.»
As-tu une clientèle à Maurice qui a recours au service d’Instinct Mind ?
« Le neuromarketing, basé sur les fondements de la neuroscience, reste une stratégie marketing qui peut être appliquée dans n’importe quel domaine. À Maurice, notre plus grosse clientèle se trouve dans la publicité. Nous avons commencé à travailler avec les entreprises publicitaires. Avec ces dernières, nous travaillons avec leur équipe dans le but d’optimiser leur créativité afin de pouvoir monter une campagne de communication qui touchera une large audience.
Il faut comprendre que nous agissons au moment de la création du design. À savoir également, qu’au bout du compte, ce que la compagnie recherche, c’est vraiment ce « return on investment » de la campagne. »
À part les capteurs neurologiques, quelle technologie ou application Instinct Mind utilise-t-il dans ces analyses ?
« Instinct Mind utilise un « software » que nous avons développé et baptisé du nom de la compagnie. Nous avons tout d’abord besoin de capteurs appelés « eye tracking » et d’un logiciel qui va enregistrer toutes les données. Ces capteurs, une fois connectés à l’homme, donnent à chaque milliseconde, toutes les ressentis de ce dernier. Nous travaillons ensuite sur les retombées des analyses faites par le logiciel. C’est là que nous pouvons tirer les conclusions nécessaires et faire des recommandations aux clients. »
Venons-en à la seconde activité de ton entreprise, le marketing sensoriel. Dis-nous un peu plus sur ce service.
« Tout d’abord, il faut comprendre ce que c’est le marketing sensoriel. Le terme « sensoriel » renvoie aux cinq sens de l’homme, c’est-à-dire le toucher, la vue, l’ouïe, le goût et l’odorat. Le marketing sensoriel a recours à un ou plusieurs de nos sens avec l’objectif de séduire le consommateur tout en stimulant ses sens. Le but ultime de ce genre de marketing est d’influencer favorablement le comportement du consommateur vis-à-vis d’un produit ou au sein d’un point de vente. Chez Instinct Mind, le service de marketing sensoriel que nous proposons repose sur l’odorat.
La manière dont nous fonctionnons est très simple ! Pour les clients auquel nous offrons ce type de service, nous plaçons des diffuseurs professionnels. Ce diffuseur est capable de véhiculer une odeur spécifique dans un environnement précis, qui jouera avec les souvenirs de la personne qui la sent.
Prenons l’exemple du magasin Rip Curl, qui propose des vêtements de plages entre autres. Dans le magasin, nous plaçons un diffuseur qui va renvoyer l’effet de plage au consommateur. Et inconsciemment, ce dernier va rentrer dans cette atmosphère de plage, l’incitant à effectuer un achat, car inconsciemment, il désire aller à la plage.
Le marketing sensoriel à Maurice est perçu comme un « investment product. » Nous proposons ce service à des hôtels, des commerces (retail shop) et également des entreprises pour, par exemple, réduire le stress des employés en diffusant un parfum qui va stimuler leur sens et les relaxer.
Il faut quand même dire qu’à Maurice ce service est difficile à vendre, car il est encore méconnu. Il nous faut donc fournir aux clients toutes les informations, voire leur proposer d’essayer. De ce fait, pour trouver nos clients, nous procédons vraiment à travers le networking.»
Cette startup mauricienne, Instinct Mind, est une preuve que la technologie n’est pas le seul secteur innovant. Ici, il ne s’agit pas d’innovation en termes d’outil numérique, mais en un concept différent. Quoi qu’il en soit, le neuromarketing et le marketing sensoriel apportent un vent de fraîcheur dans le domaine du marketing traditionnel.