L’intelligence artificielle s’immisce de plus en plus dans notre vie. En effet, certaines sociétés font déjà usage de l’intelligence artificielle pour automatiser des tâches comme le fait d’avoir un « chatbot » sur leurs sites web qui agit comme conseiller client. Cependant, les questions liées à l’éthique dans le raisonnement de l’intelligence artificielle restent souvent peu, voire pas abordées. Focus sur cette problématique.
Exploitation des données privées
Les réflexions relatives à la protection de la vie privée doivent être repensées face à la généralisation de la collecte, de l’exploitation de masses de données individuelles s’appuyant sur des techniques issues de l’Intelligence Artificielle. La machine est constamment en train de collecter et d’analyser les données recueillies grâce aux interactions avec les êtres humains. Par exemple, les bracelets Fitbits collectent des données sensibles liées à la santé des utilisateurs. Ces données peuvent être exploitées par des compagnies d’assurances afin de promouvoir leurs produits en connaissance de cause. Elles peuvent aussi être utilisées par l’employeur qui voudrait s’assurer que ses employés sont en forme. Ceci implique que les derniers n’auront pas régulièrement recours aux polices d’assurance payées par la société.
« La donnée est le nouvel or noir. Nous devons la trouver, l’extraire, l’affiner, la distribuer et la monétiser. » – David Buckingham, savant, écrivain et consultant en sciences sociales.
Le cas Facebook
Vous êtes-vous déjà demandé comment Facebook recueille toutes les données sur sa plateforme pour ensuite vous alimenter avec du contenu qui pourrait vous intéresser ? Il existe une application qui peut répondre à ces questions. Disponible gratuitement, Data Selfie est une extension Chrome open source qui vous aide à découvrir comment les algorithmes de « machine learning » suivent et traitent votre activité sur Facebook. Grâce à ces données, ces algorithmes peuvent construire votre profil psychologique et dresser votre typologie sociale.
« Facebook aujourd’hui ne peut pas exister sans IA. Chaque fois que vous utilisez Facebook ou Instagram ou Messenger, vous ne le réalisez pas, mais vos expériences sont alimentées par l’IA. » – Directeur de L’Ingénierie en Applied Machine Learning chez Facebook.
Data Selfie suit essentiellement votre activité sur Facebook : ce que vous regardez, combien de temps vous interagissez avec certaines publications, les types de publications sur lesquelles vous cliquez – puis applique des algorithmes de traitement de langage et d’apprentissage automatique à partir d’IBM Watson et de l’Université de Cambridge pour transformer ces données en informations. L’extension utilise également des analyses prédictives pour deviner des choses comme vos affiliations politiques, ainsi que les achats et les préférences nutritionnelles.
Les voitures autonomes
Avoir une voiture autonome deviendra à moyen terme une réalité pour ceux qui peuvent se le permettre. Cependant, il existe de nombreuses interrogations en ce qui concerne l’éthique liée aux voitures autonomes. La machine raisonne par dilemme. Prenons le cas de figure où une voiture autonome se dirige vers un mur qu’elle ne peut éviter. Deux options à considérer :
- Écraser une foule de piétons pour sauver son passager ?
- Ou sacrifier son passager pour sauver le maximum de piétons ?
Certains diront qu’il faut sauver les piétons. D’autres diront que la sécurité du passager doit être la principale considération de l’Intelligence Artificielle. Le Massachusetts Institute of Technology (MIT) a développé un outil numérique : la Moral Machine. Les internautes ont la possibilité d’évaluer des cas concrets et de proposer d’autres cas concrets pour solliciter la participation de la communauté présente sur la plateforme. La Moral Machine pose la question suivante : qu’auriez-vous fait en tant qu’IA dans une telle situation ? Les résultats varient fortement selon les individus. En effet, dans ce chaos, nous réalisons qu’il est impossible d’établir, pour le cas unique des voitures autonomes, des règles éthiques universelles.
Former les ingénieurs de demain à l’éthique
Les programmes universitaires en Intelligence Artificielle doivent dès maintenant incorporer des modules liés à l’éthique. En effet, les futurs ingénieurs peuvent être tentés de créer des IA ultras performantes, mais aux conséquences néfastes sur l’emploi. Par ailleurs, il n’est pas à écarter que certains ingénieurs développent des solutions IA pour asseoir leur crédibilité dans l’industrie, se souciant peu des implications socio-économiques. De ce fait, il faut commencer un travail de sensibilisation des étudiants sur l’éthique. Il faut avoir des débats sur les questions morales qui entourent la technologie. Étant au début d’une nouvelle ère technologique, il faut prendre les devants pour lister les bonnes pratiques pour la prochaine génération d’ingénieurs.
Intelligence Artificielle à Maurice
L’Intelligence Artificielle telle qu’elle se développe en Europe et aux États-Unis n’est pas encore inscrite dans les mœurs mauriciennes. Cependant, avec la croissance exponentielle des innovations, nous pouvons envisager que les acteurs au sein de l’économie mauricienne se pencheront sous peu sur les mêmes questions liées à l’éthique de l’IA. A cet effet, il faudra aussi compter sur l’évolution du cadre juridique autour de l’utilisation de ces technologies.