Vous lisez cet article sur votre écran de smartphone cassé ? Et s’il suffisait d’une pression des doigts pour qu’il redevienne comme neuf ? Une rêverie pas si utopique puisqu’une équipe de scientifiques japonais vient d’inventer un écran de smartphone qui se répare tout seul !
La découverte d’un matériau miracle : le verre auto-régénérant
C’est Yu Yanagisawa, un doctorant du département de chimie et de biotechnologie de l’université de Tokyo qui a découvert le matériau miracle par hasard, alors qu’il cherchait à fabriquer une glue capable de fonctionner sur une surface mouillée. Il a suffi au chercheur japonais de presser ensemble pendant une trentaine de seconde deux bouts de sa fabrication pour que le matériau redevienne un bloc. Le verre a retrouvé sa robustesse originelle deux heures plus tard seulement.
Ce matériau est fabriqué à partir d’un polymère transparent de faible masse, le « polyéther-thiourée », qui utilise le composant thiourée dont la liaison hydrogène procure au verre sa vertu autocollante.
Avant la découverte de Yu Yanagisawa, il existait déjà des caoutchoucs et gels capables de boucher leurs trous tout seuls et de combler leurs rayures. En 2015, LG avait intégré au dos de son smartphone G Flex 2 une substance capable de réparer de petites fissures. Le fabricant sud-coréen n’avait en effet pas pu intégrer cette matière à l’écran du smartphone puisqu’elle ne conduisait pas l’électricité.
L’an dernier, des chercheurs américains de l’université de Californie avaient fait une avancée en la matière en élaborant le premier polymère conducteur capable de s’étirer jusqu’à cinquante fois sa taille et réparer ses propres fissures en 24 heures. Mais ces matériaux étaient jusqu’à présent mous, avec des propriétés qui s’altéraient dans des conditions de grande humidité.
Ce nouveau polymère est différent, car il est à la fois robuste comme le verre et capable de s’auto-réparer. Jusqu’à présent, on pensait impossible de concilier ces deux capacités dans les composés modifiés. « La haute robustesse mécanique et la capacité de cicatrisation tendent à s’exclure mutuellement. Dans la plupart des cas, il faut atteindre des températures élevées – de l’ordre de 120°C – pour que les portions fracturées puissent être réparées », expliquent les chercheurs dans leur étude, publiée dans la prestigieuse revue américaine Science. Contrairement aux autres matériaux rigides de même type, la réparation de ce polymère s’effectue donc à température ambiante et par simple pression du doigt pendant une trentaine de secondes uniquement. Sa rapidité d’auto cicatrisation extrêmement élevée le positionne au-dessus des autres matériaux précédemment développés.
Un matériau écologique convoité par les industriels
Ce prototype d’écran anto-régénérant fera des heureux dans les années à venir. En effet, les écrans sont fragiles : 21,7 % des smartphones utilisés au Royaume-Uni auraient un écran en partie brisé d’après le réparateur spécialisé iMend. Mais en plus de cela, leur réparation coûte cher : il faut débourser plus de 300€ rien que pour changer l’écran du dernier iPhone à titre d’exemple. Le bris d’écran est l’un des premiers motifs de remplacement d’un smartphone.
En somme, les écrans brisés sont une plaie, autant pour les consommateurs que pour l’environnement : « J’espère que ce verre réparable deviendra un nouveau matériau écoresponsable qui évitera d’avoir à jeter des appareils dès qu’ils se brisent », a déclaré Yu Yanagisawa. Il n’est pas sûr cependant que les fabricants de smartphones, qui facturent les remplacements d’écran de plus en plus cher, trouvent un intérêt à utiliser ce genre de verre.
Les matériaux auto-régénérants représentent par ailleurs un axe important de recherche-développement dans le monde entier pour d’autres domaines que celui des écrans de téléphone. Ils permettraient, par exemple, d’éviter l’apparition de microfissures dans des pièces industrielles susceptibles de s’élargir au fil du temps, menant à des accidents. Un autre domaine pour lequel des matériaux auto-cicatrisants pourraient être d’une grande utilité : la médecine. Mais ils pourraient aussi révolutionner la fabrication des jouets, de la vaisselle ou des phares des voitures.
Alors qu’aujourd’hui nous sommes obligés de jeter ces objets dès qu’ils cassent, nous pourrions dans un futur proche les réparer d’une simple pression du doigt.