En signant le décret anti-immigration le 27 janvier dernier, Donald Trump ne se serait-il pas mis à dos les patrons des grandes entreprises technologiques de Californie ? Avec ce décret, le président américain bloque l’accès du territoire américain aux ressortissants de 7 pays musulmans, à savoir l’Iran, l’Irak, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et le Yémen. Selon Donald Trump, cette décision a été prise pour avoir un contrôle sur la menace terroriste aux États-Unis.
Après le choc, un vent de résistance se fait sentir
À la suite de la signature de ce décret, les patrons des grandes sociétés technologiques ont exprimé leur opinion. Les dirigeants d’entreprises comme Microsoft, Google et Twitter, entre autres, qualifient cette situation de « préoccupante » ou encore de « grand recul qui nuit à la réputation du pays ». L’Internet Association, composé de grandes firmes telles qu’Uber, PayPal, Amazon, LinkedIn, Ebay et encore une dizaine de sociétés, a rejoint les entreprises qui sont contre la signature de ce décret.
Au fur et à mesure, cela ressemble plus à un mouvement de résistance de la part de ces entreprises. En effet, s’inspirant de Starbucks qui propose d’embaucher environ 10 000 réfugiés en 5 ans, Airbnb a déclaré que des hébergements seront fournis aux réfugiés ainsi qu’aux personnes interdites d’accès aux États-Unis. De leur côté, Microsoft, Intel (fondé par un migrant) et Amazon proposent des services d’aide juridique pour les employés touchés par la décision du président américain.
« Ne pas rester silencieux face à des problèmes qui menacent les valeurs de notre communauté » : voici les propos des cofondateurs de la société « Lyft » à l’égard du décret d’anti-immigration. Cette compagnie, principale concurrente d’Uber, a déclaré qu’elle ferait un don de 4 millions de dollars par an à une association de défense des libertés individuelles sur une période de 4 ans. Dans cet élan, l’association « Mountain View » a récolté 4 millions de dollars pour des associations d’aide aux migrants.
Une prise de position stratégiquement réfléchie
Cette mobilisation des grandes sociétés de la Silicon Valley face à la signature de ce décret n’est pas sans but. En effet, la majorité de la force de travail de ces compagnies est constituée de migrants. Or, les entreprises situées dans la Vallée sont directement touchées par ce décret. Avec une grande partie de leur force de travail bloquée en dehors du territoire américain, les firmes technologiques grognent face à la décision de Donald Trump.
Les entreprises de la Silicon Valley telles que Google, prônent la diversité ainsi que la connexion des frontières. Ce décret va à l’encontre de l’idéologie et des principes de la plupart de ces compagnies. D’ailleurs, cette opposition à Donald Trump se manifestait déjà durant la campagne électorale. En argent sonnant et trébuchant, 99 % des dons de la Silicon Valley ont été destinés à la candidate démocrate Hilary Clinton.
Une idéologie remise en question
L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis pourrait être le début d’un changement dans l’engagement des géants numériques de Californie. Ces entreprises avaient toutes des projets utopiques et lointains : « Think different. Make the world a better place »… Cependant, la politique de Donald Trump pourrait les forcer à se remettre en question et à se confronter à la réalité.
Certains médias parleraient même de la candidature de Mark Zuckerberg aux prochaines présidentielles, mais ce dernier a vite démenti la rumeur. Le patron de Facebook a annoncé qu’il souhaiterait finir l’année en ayant visité et rencontré des gens dans tous les États-Unis.
Ce décret : un projet planifié à l’aube de l’élection Donald Trump ?
En forçant les icônes californiennes à se lancer dans la politique, Donald Trump pourrait être tout simplement le catalyseur d’un mouvement ayant vu le jour avant même son élection à la présidence des États-Unis. En 2016, il y avait eu une accroche entre le Bureau fédéral d’Investigation (FBI) et Apple. Ce dernier refusait de déverrouiller un iPhone ayant appartenu à un terroriste. Le Directeur général d’Apple était alors perçu comme un défenseur de la vie privée et des libertés. Dans cette démarche, Apple a reçu le soutien de Google et de WhatsApp dans son opposition au FBI. Étant candidat aux élections primaires des républicains, Donald Trump avait pleinement critiqué la décision du PDG d’Apple de s’opposer à la police fédérale.
Uber et Tesla : un jeu de double face ?
Malgré leur opposition à la politique de Donald Trump, les entreprises de la Silicon Valley ne donnent pas l’impression de vouloir changer, et leur contestation ne dépasse pas la limite de leurs intérêts particuliers. Fin 2016, plus précisément en décembre, Trump avait réuni les principaux acteurs de la technologie digitale. Jeff Bezos avait alors déclaré que cette rencontre avait été très productive.
Avant cela, les patrons de Tesla et Uber (Elon Musk et Travis Kalanick) avaient rejoint le « forum de conseil économique » fondé par Donald Trump pour permettre aux principaux acteurs économiques du pays d’être conseillés et informés sur les mouvements qui se déroulent dans leurs secteurs respectifs. Cette « alliance » est favorable aux deux partis concernés : les acteurs économiques et Donald Trump. D’ailleurs, les projets annoncés par le président américain ont fortement contribué à ce rapprochement, car d’immenses investissements dans les infrastructures du pays ont été annoncés par Trump. Certains de ces acteurs économiques seront privilégiés par ces décisions, Elon Musk par exemple.
Une façon de voir les choses d’un angle divergeant
Les deux dirigeants d’Uber et de Tesla ont tout de même rejoint le mouvement d’opposition au décret d’anti-immigration du Président Donald Trump, malgré un premier rapprochement. Travis Kalanick, le patron d’Uber, a quant à lui attendu d’être mis sous pression par ses usagers avant de réagir contre la signature de ce décret. Ce dernier a aussi proposé d’être le médiateur pour que celui-ci soit amendé plutôt que condamné.
D’autres géants du numérique, de grande influence sociétale, tels que les GAFA ou NATU entre autres, ont du mal à se défaire des attentes d’engagements politiques de la part de leurs usagers. Ce rôle occupé par les sociétés de la Silicon Valley est difficile à gérer. Devenir un « clan » libertaire ou de défenseur de l’administration conservatrice instaurée par le nouveau président américain Donald Trump ? Cette question reste pour le moment sans réponse, seul l’avenir nous le dira.