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L’île Maurice à la conquête de l’espace avec CubeSats !

L’île Maurice à la conquête de l’espace avec CubeSats !

Toucher du bout des doigts les étoiles ou la lune comme Neil Amstrong l’a fait, nous en rêvons tous ! Faute de ne pas pouvoir initier ce voyage dans la vie de tous les jours, nous admirons ceux qui en ont la capacité. D’ailleurs, l’île Maurice semble être prête à conquérir l’espace grâce à CubeSat. La Redac d’Ict.io s’est entretenue avec Baptiste Lombard, ingénieur dans l’aérospatial chez Clyde Space.

 

 

Un satellite 100 % mauricien est sur le point de voir le jour ! Oui, vous avez bien lu…L’année 2019 sera l’année durant laquelle Maurice va conquérir l’espace en lançant son premier satellite : CubeSat.

Des équipes locales, encadrées par le Mauritius Research Council (NDLR : MRC, qui opère sous l’égide du Ministère de la Technologie, de la Communication et de l’Innovation), composées d’ingénieurs aérospatiaux, d’informaticiens, d’électroniciens et de data scientists auront un an pour construire le CubeSat. Le satellite sera lancé dans l’espace par les Japonais de JAXA – Japanese Aerospace eXploration Agency. Un lancement qui sera effectué à partir de l’International Space Station (ISS).

Quels sont les intérêts voire les retombées, une fois que Maurice aura lancé un tel projet ? Pour y voir plus clair, la Redac d’Ict.io s’est entretenue avec Baptiste Lombard, ingénieur dans l’aérospatial chez Clyde Space. Clyde Space, basée au Royaume-Uni aidera, peut-être, les autorités mauriciennes dans le développement dans la mission de lancement du CubeSat mauricien.

 

Décrivez-nous ce parcours qui vous a conduit à devenir ingénieur chez Clyde Space ?

« Mon parcours scolaire m’a conduit vers la filière ingénierie aéronautique. Poussé par ma passion des airs, j’ai choisi d’intégrer une école spécialisée dans l’aéronautique et le spatial : ELISA AeroSpace, en France. Mon cursus, mes stages en entreprise et mes diverses expériences bénévoles ont coloré mon profil et ont attiré l’attention d’une toute jeune et ambitieuse start-up : NovaNano (Lyon, France).

C’était la première entreprise du New Space en France, avec l’objectif de développer des CubeSats (nano-satellites = satellites de 1-20kg) et les systèmes de déploiement associés. J’y ai passé 5 années passionnantes, apprenant le métier d’ingénieur en conception satellite et de mission spatiale, rencontrant des personnes aux expériences extraordinaires et vivant l’aventure d’une jeune start-up, avec ses challenges et ses réussites uniques.

En 2016, j’ai décidé de partir à l’étranger pour poursuivre ma carrière dans le domaine des nano-satellites. J’ai finalement intégré Clyde Space, basé en Écosse (Royaume-Uni), qui a une renommée internationale en termes de conception et fabrication de CubeSats. Clyde Space a fusionné avec ÅAC Microtec (Suède) début 2018. ÅAC-Clyde est aujourd’hui un des leaders mondiaux de l’industrie des nano/micro satellites.»

 

L’île Maurice à la conquête de l’espace avec CubeSats !

 

Quel projet développez-vous en ce moment ?

« Je travaille sur le projet Seahawk pour la NASA. Seahawk est un satellite de moins de 5kg (aussi grand qu’une boîte de whisky). Sa caméra embarquée va prendre des images des côtes et permettre de détecter la présence de phytoplanctons, de sédiments ou d’autres facteurs liés à la pollution marine. La mission Seahawk consistera à vérifier que les performances d’un tel système miniature sont suffisantes pour envisager un possible remplacement des satellites historiques, qui sont bien plus lourds et onéreux.

Plus précisément, j’ai participé aux activités de design et je suis maintenant en charge de préparer les opérations, c’est-à-dire la vie en orbite du satellite et la manière dont le centre de contrôle va gérer le planning des activités en orbite et la distribution des images. Gérer les interfaces pour le lancement et prendre en charge les opérations d’un satellite pour le compte du client fait partie de la nouvelle offre de ÅAC-Clyde. En bref, nous proposons maintenant le service « mission satellitaire » clé en main, c’est-à-dire depuis la conception – fabrication – test – lancement jusqu’aux opérations en orbite, le client pouvant se reposer sur nous et se concentrer sur son cœur de métier (l’utilisation des données). Il y a beaucoup à développer et c’est une nouvelle aventure passionnante.»

 

Comment se porte le secteur de l’aérospatial en général ? Et à Maurice ?

« Le secteur spatial est en pleine expansion. Le spatial traditionnel est poussé par les nouvelles technologies, qui ne cessent d’améliorer les performances et les process de fabrication ou d’opération des satellites.

Le « New Space » est un secteur encore plus excitant, qui utilise les savoir-faire de différentes industries et les appliquent au spatial en bousculant la philosophie traditionnelle. Prenez SpaceX comme exemple le plus connu. La retransmission du dernier lancement a des airs de science-fiction avec l’atterrissage simultané des premiers étages de la fusée !

Peut-être le marché le plus inexploité aujourd’hui est l’offre de services, qui utilise les données spatiales. Des plateformes se développent pour accéder facilement aux services spatiaux. Deux exemples:

Communication machine to machine (ou internet des objets) par satellite pour relayer des capteurs dans les champs, dans les montagnes ou sur les mers (possible application : améliorer les récoltes tout en utilisant moins de pesticides) ;

Observation quotidienne de la Terre pour surveiller l’environnement, mais aussi différents assets comme les bateaux, les flux de circulation, l’aménagement et l’utilisation des territoires, etc. (possible application : détecter la pêche illégale autour de l’île)…

Le spatial à Maurice en est aujourd’hui à ses balbutiements, avec principalement de la recherche internationale en radioastronomie. Sur Maurice, il y a aussi une antenne utilisée par des satellites du monde entier pour télécharger leurs données sur Terre. Enfin, le MRC (Mauritius Research Council) est en train de piloter un projet de premier satellite mauricien.

Et pourtant le potentiel pour un secteur spatial à Maurice est très intéressant. Maurice a une position unique à l’international lui permettant de créer des partenariats de collaboration. De plus son secteur informatique très dynamique permettrait de développer de nouveaux services pour les utilisateurs finaux, que ce soit dans l’utilisation des services spatiaux (communication, IoT) ou l’utilisation des données spatiales (traitement d’images pour une multitude d’applications qui bénéficient à l’amélioration de la vie quotidienne).»

 

L’île Maurice à la conquête de l’espace avec CubeSats !

 

Quels intérêts pour le pays de lancer un satellite mauricien ?

« Le spatial est un secteur porteur sur le long terme et sur tous les plans : éducatif, scientifique, économique, politique et géopolitique. Un secteur spatial florissant favorise l’amélioration du niveau d’éducation du pays et les collaborations scientifiques. De nombreuses études internationales s’accordent sur les excellentes retombées économiques de l’industrie spatiale, sans compter le développement de nouvelles technologies qui améliorent la vie locale et multiplient les opportunités de travail qualifié.

Les applications du spatial pour l’île Maurice sont multiples et vont de la surveillance des eaux territoriales au soutien des pêcheurs ; de la mise en place d’un service de relais de communication pour les zones reculées à la surveillance de la pollution, des niveaux d’eau douce, des risques de glissement de terrain, etc., de la cartographie à l’analyse de l’évolution des territoires ; de l’amélioration des prévisions météorologiques à l’assistance pour une agriculture efficace et raisonnée…»

Quels seraient les avantages de mettre en place un tel projet ?

« Le premier satellite mauricien serait probablement un satellite de démonstration, c’est-à-dire un satellite assez petit (donc peu onéreux), qui embarquerait une technologie-clé pour un futur programme spatial (cela peut être un instrument scientifique, une antenne, une caméra…) en vue de développer certaines applications mentionnées précédemment.

À travers un tel projet, Maurice aurait l’opportunité d’apprendre beaucoup sur la conception et l’opération d’un satellite. Ce serait aussi un excellent exercice pour commencer à se structurer en vue de développer un programme spatial ambitieux qui apporte un service unique et réponde à un besoin critique de Maurice. »

 

Avez-vous déjà approché une instance ou avez-vous été sollicité pour mettre en place un tel projet à Maurice ?

« Invité par le MRC (Mauritius Research Council), Clyde Space a tenu un stand lors du salon InnovTech en décembre 2017. C’était l’occasion de découvrir ce magnifique pays et d’affermir la relation entre Clyde Space et le MRC. »

Une rencontre qui peut se qualifier de fructueuse puisque le premier satellite mauricien sera lancé avec l’aide de Clyde Space.

 

L’île Maurice à la conquête de l’espace avec CubeSats !

 

Le CubeSat mauricien, gagnant du concours KiboCUBE

Si l’annonce du lancement de ce premier satellite mauricien fait déjà rêver plus d’un, CubeSat séduit déjà ! En effet, cette toute première initiative satellitaire mauricienne a remporté le premier prix du concours KiboCUBE de UNOOSA (NDLR United Nations Office for Outer Space Affairs) le lundi 18 juin dernier à Vienne (Autriche). Ce projet est sorti du lot, parmi les nombreuses autres soumissions, par sa qualité technique et l’impact immédiat que le satellite aura sur le pays.

Le CubeSat permettra aux autorités mauriciennes de recueillir des données qui serviront à adresser trois problèmes majeurs de priorité nationale. Trois axes identifiés par le gouvernement, notamment la surveillance des océans et la gestion optimale des ressources océaniques, le contrôle du trafic routier et l’atténuation des effets des catastrophes naturelles.

Un projet qui servira sans aucun doute de modèle pour d’autres petits États insulaires en développement. L’île Maurice se voit donc offrir un avenir prometteur dans l’aérospatial…

 

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